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.Poète… homosexuel… voleur… j’étais sérieusement étalonné.S’il avait voulu me faire comprendre qu’il y avait une place de mauvais larron à prendre, l’abbé ne se serait pas arrangé autrement.Sophie sous la lampe, c’était réconfortant.Elle avait peint avec acharnement des chevaux de bois qu’elle n’achèverait jamais.Elle portait un sarrau de toile écrue qui en avait vu de toutes les couleurs.Elle avait déjà dîné, sur un coin de table, dans des vapeurs de benzine, une mèche dans l’œil, un livre sur les genoux.Je mangeai dans son assiette, je bus dans son verre.Je ne connus pas davantage ses pensées.Peut-être buvait-elle au robinet ?Parce qu’elle s’était cognée à un bahut Renaissance, dans l’obscurité du couloir, elle joua à ma prédire sa mort prochaine :— Un bahut d’époque, tu comprends ce que ça signifie ?— Non.— Il a été tripoté par des seigneurs avec leurs sales mains.— Espérons-le pour celui-là.— C’est bien ce que je disais, conclut-elle, en me montrant une petite égratignure : j’ai attrapé le mal de Naples.Elle rougit, comme chaque fois qu’elle faisait une allusion à l’amour.Je détournai la tête.Quel âge avions-nous ? L’impression qu’elle me guettait, qu’elle attendait quelque chose, un geste, réveilla mon irritation.Je me rappelai ce camarade serbe… des partisans l’avaient obligé à s’étendre sur sa sœur… Ainsi Sophie et moi, nous avait-on éduqués pendant cinq ans dans l’observance d’une tendresse chaste pour nous pousser ensuite subitement l’un sur l’autre, comme des chiens dont on dénoue la laisse.Le contrordre était sans doute venu trop tard.Cette organisation de l’inceste me décontenançait.La qualité d’amour que j’éprouvais pour Sophie requiert des preuves concertées.Ce n’était pas dans les sentiments que je manquais de suite, c’était dans les idées.Pour la première fois depuis ma métamorphose, la joie de vivre retomba comme un soufflé.J’en voulus à ma femme de ce qu’elle accumulât tant d’innocence au moment où j’allais la tromper.Était-ce même la tromper que de retrouver Albertina dans une autre dimension de l’existence ? Sophie demeurait liée à un système auquel je voulais échapper, mais je l’aimais.Je n’étais pas certain d’aimer Albertina, mais elle était l’ange du désordre.— Très haute, très puissante, très honorée princesse Albertina d’Arunsberg-Giessen a téléphoné, dit Sophie, pour nous prévenir qu’elle ne prendrait pas ses repas chez nous, comme il était convenu.Elle a trouvé, paraît-il, une combinaison qui lui épargnera de nous déranger.Son oncle part demain soir.Il compte que tu lui porteras ce que tu lui as promis.Ce n’est pas de l’argent, au moins ?— Non, non, c’est le catalogue de la manufacture d’armes de Saint-Étienne, pour l’équipement agricole, répondis-je distraitement.Je sentais monter en moi une allégresse tortueuse : Albertina avait décidé de ne pas venir à la maison.Elle voulait se préserver des tentations de l’amitié, de la contagion de notre torpeur, se réserver.Là où Sophie, si elle avait eu le moindre soupçon, s’en fût trouvée allégée, je déchiffrai au contraire une promesse tacite.La complicité venait de changer de camp.CHAPITRE VIIL’adultère en rase campagne convient aux cœurs simples.Il ne fortifie pas ceux dont la passion, ou le plaisir, se rehausse des ruses qu’il leur faut déployer pour l’assouvir.De même qu’il y a de la jouissance dans le danger, il existe un bonheur du stratagème.Les rendez-vous qui ont un parfum d’embuscade, les exodes furtifs, les baisers interrompus, entretiennent les sentiments.Je n’aurais pas pu passer huit jours avec Albertina dans une auberge de forêt.J’en connaissais pourtant plusieurs dont certains de mes camarades m’avaient vanté les mérites et la discrétion.Elles manquaient trop d’inconfort.Je ne pouvais mériter Albertina que dans la difficulté.L’exercice de la vigilance et de l’angoisse m’épargnait d’avoir mauvaise conscience.Il est beaucoup pardonné aux réprouvés.Loin de se consumer de soi-même en une bonne flambée, notre amour me devint une occupation journalière, technique et tactique, un second métier.Pas tout à fait celui dont mon beau-père avait rêvé.Par là, je m’y attachai avec zèle et il finit par dévorer toute ma vie sans que j’y prisse garde.En vérité, je n’avais rien souhaité d’autre.Les amants sont des urbanistes, ils retracent des routes, réveillent des itinéraires oubliés, rendent la vue aux hôtels borgnes.Ils sont architectes et construisent une ville à l’intérieur d’une autre.Ils sont diplomates et annexent des provinces sur un simple sourire.Et leurs pouvoirs tiennent du magicien car ils ont les mains vides.Albertina et moi qui, dans les premiers temps, figurions assez bien des mariés de plein vent, sous la communauté de biens réduite aux nuages, en vînmes à lier notre aventure à tant de paysages et de visages nouveaux que nous ne sûmes bientôt plus de quel côté de la frontière était l’exil [ Pobierz całość w formacie PDF ]

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